Je m’appelle Marie-Eve et je suis de la nation huronne-wendat. Je travaille aujourd’hui en tant qu’intervenante psychosociale au Projets Autochtones du Québec.
Je suis née dans la région de l’Outaouais d’une mère québécoise et d’un père huron-wendat. J’ai 2 sœurs et un frère. Pour nous tous, il était important de faire des activités ensemble. En fait, j’ai grandi au sein d’une famille aimante avec laquelle j’entretiens encore de très bons liens. La famille fait partie de mes plus grandes valeurs. Lorsque j’étais jeune, nous faisions beaucoup de voyages et d’allers-retours entre Gatineau et le Saguenay pour passer du temps avec mes grands-parents à leur chalet en forêt. Durant ces semaines, nous pratiquions la chasse et à la pêche. Cette alternance ville-nature s’inscrivait dans notre mode de vie à la moindre occasion.
Ma période d’adolescence s’est passée en grande partie dans le sud des États-Unis, principalement en raison du travail de mon père. L’arrivée aux États-Unis a été un gros déracinement pour moi et pour toute la famille. C’est à l’âge de 14 ans que j’ai décroché de l’école et suis tombée dans la délinquance. Cette période de crise a duré un certain temps. Le chemin que j’avais alors décidé de prendre n’était pas nécessairement le plus facile. Je me suis vite rendu compte que sans scolarité je me retrouverais toujours dans des emplois précaires. Vers mes 17 ans, j’ai décidé de revenir à mes racines. J’ai alors demeuré au Village Hurons où j’ai également travaillé. À l’âge de 20 ans, je suis partie faire le tour du Canada avec mon sac-à-dos. Finalement, je suis restée 4 ans à Calgary pour explorer et pour travailler. Les déménagements et les voyages que j’ai faits ont beaucoup marqué ma vie.
Une fois revenue au Québec et après avoir passé quelque temps au Village Hurons, j’ai choisi Montréal pour des raisons stratégiques, la métropole m’ouvrant davantage de perspectives que la ville de Québec. A cette époque, j’ai vécu une période d’instabilité résidentielle. Cette période plus creuse de ma vie m’a fait découvrir Projets Autochtones du Québec situé au 90, rue de la Gauchetière Est. Pendant environ 3 mois, j’ai fréquenté PAQ; c’était un endroit sécuritaire qui répondait à mes besoins essentiels.
À l’âge de 27 ans, j’ai décidé de retourner aux études de façon plus soutenue. J’ai effectué un programme qui m’a permis d’aller travailler dans un cabinet d’avocats en litige. Cette expérience spécifique m’a motivée à entreprendre des études collégiales et universitaires; je voulais devenir avocate. Je suis entrée à l’Université de Montréal afin d’augmenter ma moyenne pour aller en droit. J’ai donc fait un baccalauréat en criminologie, en action communautaire et en travail social. Cependant, ce diplôme n’a pas influencé ma moyenne de façon considérable. Je me suis donc bâti un plan B et j’ai commencé un programme en développement de carrière dans le domaine de l’orientation. Les études ont été en grande partie une thérapie de guérison pour moi.
À la suite de mes études, j’ai obtenu un poste en employabilité, qui m’a révélé ma nette préférence pour le côté psychosocial de l’être humain. Aider ma communauté et être partie prenante à la défense des droits autochtones et à la défense des valeurs liées à la culture me motivent d’autant plus. J’ai choisi de venir postuler au Projets Autochtones, car la mission de cet organisme colle davantage à mes valeurs de travail.
Je pense être une bonne source d’inspiration pour la communauté étant donné mon expérience. Le fait d’avoir connu les deux côtés de la médaille facilite ma compréhension des besoins et du vécu de la clientèle. Avec moi, les participants peuvent travailler sur plusieurs sphères de leurs vies et sur leurs objectifs personnels ou professionnels de court-moyen terme.
Ce que j’aime à PAQ, c’est l’ambiance et l’esprit de communauté qui règnent. Les gens se reconnaissent ici et j’entends souvent : « I’m going home ». Ils ne voient pas l’endroit comme un refuge, mais comme leur maison, ce qui me touche beaucoup. De plus, PAQ m’apporte une joie de vivre et pratiquement une 2e famille, puisque la mienne habite dans la région de Québec. C’est également une discipline dans ma vie. Je pense apporter aux participants une façon positive de voir les choses. J’aime utiliser l’humour pour dédramatiser les choses, quelle que soit la difficulté vécue.
Plusieurs objectifs personnels me tiennent à cœur, mais celui qui m’anime le plus en ce moment, c’est un nouveau projet de chalet familial. À plus long terme, j’aimerais réaliser plusieurs rêves, qui seront de bons investissements pour l’avenir, mais tout d’abord, je veux terminer ce que j’ai commencé à Montréal.
Finalement, je pense qu’il reste beaucoup à faire pour les Autochtones, bien qu’on ait fait un peu de chemin. Si quelque chose pouvait être meilleur pour eux, ce serait que l’on change l’opinion publique négative en valorisant nos expériences positives et en renforçant notre estime en tant que Nation à travers le Canada. Ce qu’il faut pour que s’amorce le changement, ce sont avant tout des gens qui s’engagent et qui s’investissent.